Page 2 - Talence_CiteMag_Decembre2017
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UNE ANNÉE PARTICULIÈRE
Comme chaque fin d’année, « Talence Mag » est allé rencontrer le Maire de Talence pour lui demander la manière dont il avait vécu l’année écoulée, non seulement pour sa ville, mais au-delà, dans son pays, dans le monde. Seul changement cette année, l’identité de notre interlocuteur.
« Talence Mag » : Monsieur le Maire, on imagine que d’un point de vue personnel cette année restera im- portante et peut-être plus encore, mais au-delà quels furent les évè- nements, les lignes de tension, qui, dans le monde, ont le plus retenu votre attention ces douze derniers mois ?
Emmanuel Sallaberry: D’abord, vous avez raison. Cette année restera à plus d’un titre exceptionnelle pour moi. Parce que j’ai eu l’honneur d’y succéder à Alain Cazabonne comme Maire de Talence, bien sûr, mais si vous le permettez, aussi parce que j’y ai appris un autre métier, le plus beau et le plus exigeant, celui de père, avec mes deux jumeaux...
Ensuite, la première image qui me vient de cette année écoulée, c’est sans doute celle de l’investiture de Donald Trump à la Mai- son-Blanche. On ne peut pas ne pas noter l’inquiétude que cela a créé dans le monde, ni le contraste avec son prédécesseur... La première puissance militaire mondiale paraît comme incontrôlable, n’hésitant pas à réactiver de vieux conflits comme avec la Corée du Nord, sans que l’on soit réelle- ment sûr qu’elle en ait calculé tenants et aboutissants. Il en va de même avec l’ahu- rissant retour aux affaires (dans tous les
sens du terme...) des climato-sceptiques. C’est une politique unilatérale à courte vue et isolationniste.
L’autre évènement, plus frais encore dans ma mémoire, que je retiendrai, c’est l’attentat de Barcelone, cet été. Devoir rajouter cette ville à toutes celles déjà victimes de la barbarie islamiste est un déchirement. Les Ramblas, c’est un lieu de jeunesse, de mixité sociale, un lieu de vie où, une fois de plus, la mort a frappé. Je connais et j’aime cette ville qui est essentiellement à travers l’histoire un symbole de liberté, depuis la lutte pour la République jusqu’aux JO de 92 avec ce duo baroque et magnifique de Montserrat Caballe et Freddie Mercury pour la céré- monie d’ouverture, sans oublier pour nous en France, le beau film de Cédric Klapisch, L’auberge espagnole. Bien sûr, je ne peux pas m’empêcher de me questionner pour savoir si cet attentat a quelque rapport que ce soit avec la résurgence forte du mouvement nationaliste catalan que l’on a pu observer cet automne. En tout cas, là aussi, cela doit nous interroger sur le rôle de l’Etat-Nation au XXIe siècle. Je ne mé- connais pas l’identité catalane qui est plus qu’une province, une langue, une culture, une histoire, mais il me paraît essentiel de pouvoir la faire cohabiter au sein d’un plus vaste ensemble national, dans un mutuel respect.
C’est un peu le sens du message qu’a envoyé l’Europe à cette occasion. Cette Eu- rope, dont on a trop souvent et justement déploré l’absence par le passé, et qui a donné cette année, à l’occasion de l’arrivée de nouveaux dirigeants, des signes de
réveil. Nous devons continuer ainsi à nous tenir à égale distance des deux écueils que sont l’euroscepticisme et une Europe trop exclusivement dévolue à la sphère financière.
« TM »: Sans doute parmi les nou- veaux dirigeants européens que vous venez d’évoquer, y a-t-il le Pré- sident de la République française. Son élection est-elle pour vous l’évènement majeur de l’année écoulée en France?
ES: Oui, et en même temps, ça va un peu au-delà. D’abord, c’est tout le processus électif passé qu’il convient de reconsi- dérer de l’échec des primaires pour ceux qui s’y sont essayés jusqu’aux élections législatives. Cela a totalement redessiné le paysage politique et Emmanuel Macron, bien entendu, n’y est pas pour rien. Nous assistons à la naissance d’une nouvelle «forme» politique, appelant au dépas- sement des partis, avec une assemblée fortement renouvelée, féminisée, rajeunie. D’une certaine façon, Emmanuel Macron rééquilibre ainsi l’esprit de nos institutions. C’est une bonne chose, je crois. Sa victoire acte en miroir la défaite des populismes qui n’en avaient pas connu de telles depuis trop longtemps. L’extrême-droite a été ba- layée, non seulement dans les urnes, mais aussi dans les esprits. C’est une gangrène à laquelle on pouvait craindre de s’habi- tuer; ce ne sera pas le cas. Vous savez, je fais partie de ceux qui se souviennent avoir voté pour la première fois de leur vie le 21 avril 2002...